Arrivée de l'Astrolabe et débâcle

    Voici maintenant plus de deux semaines que je suis arrivée en Terre Adélie. Je profite de ma première tempête pour écrire ce nouvel article: nous avons un vent moyen autour de 100km/h, donc les sorties sont tout de suite limitées (mais ça permet d'avoir un peu de temps pour soi). Les jours passent tellement vite, je n'ai pas le temps de m'ennuyer, et je prends au fur et à mesure mes marques. 

 

Ambiance du soir avant d'aller se coucher

    Une semaine précisément après mon arrivée, j'aperçois l'Astrolabe au loin depuis la fenêtre de ma chambre. Ça y est, le reste de la TA71 va arriver et je vais pouvoir les rencontrer pour de vrai, enfin ! D'habitude, les hivernants se rencontrent au traditionnel séminaire à l'Institut Polaire Français en septembre, mais puisque cette année n'est vraiment pas comme les autres, la semaine à Brest a été annulée, et je n'ai pas vraiment pu rencontrer mes co-hivernants avant (sauf à l'aéroport, autant dire que l'on ne se connaît pas). L'Astrolabe ne pouvant venir à quai à cause de la banquise, tout le monde est débarqué avec l'hélicoptère qui ne cesse de faire des allers-retours entre le bateau et la station. Il y a du monde sur la base, nous sommes désormais environ une bonne cinquantaine, tous métiers confondus. Cependant, j'ai assez peu de temps pour faire connaissance: la météo est bonne et il faut en profiter. Je suis donc dehors toute la journée à compter les manchots Adélie sur tout l'archipel, heureusement qu'il y a les repas pour se rencontrer sinon on ne se croiserait pas beaucoup. Tout le monde profite des bonnes conditions météorologiques, notamment pour décharger le bateau, et apporter le courrier et des fruits et légumes frais, tant attendus par les hivernants de la TA70. Le déchargement du fret s'effectue par hélicoptère, mais l'Astrolabe se fraye un chemin dans la glace pour se rapprocher de la base, afin de rendre les manipulations plus faciles et plus rapides. 

 

L'Astrolabe est bien là

Couple de manchots Adélie avec un nid bien garni de cailloux

Un Adélie présentant un plumage bien différent de celui de ses congénères

    Du jour au lendemain, la glace est fragilisée et fracturée, entraînant une débâcle: je vois désormais l'eau libre au pied de l'île. Le paysage est soudainement bien différent de celui observé lors de mon arrivée. Je découvre des îles et des bergs dans l'eau, alors que quelques jours plus tôt, je les avais atteint à pieds. C'est très joli, mais un peu embêtant car je dois encore aller sur certaines de ces îles pour compter les couples de manchots Adélies (c'est-à-dire environ 40 000 couples, ça en fait des manchots!). La seule solution pour y remédier est de prendre l'hélicoptère pour survoler les îles, prendre des photos des colonies, puis de compter les manchots sur l'ordinateur. Je n'ai jamais pris l'hélicoptère de ma vie ... Je vais donc faire mon baptême en Antarctique, la grande classe ! En 40 minutes de vol (information vérifiée avec le pilote car j'ai l'impression que cela n'a duré que 20 minutes), j'en ai pris plein les yeux. Voir ces paysages d'en haut c'est vraiment magique. Les couleurs sont extraordinaires entre le bleu de l'eau, le turquoise de l'eau sur la glace autour des icebergs, le blanc des icebergs, du glacier et du continent et le gris et noir des îles. S'ajoutent à cela les fractures et les failles du glacier et les plaques de banquise, brisées lors de la débâcle, en partie provoquée par l'avancée de l'Astrolabe. Vous l'aurez compris, c'était superbe. Je vous expliquerai par la suite en détails comment se déroulent ce genre d'opérations, car je renouvellerai les comptages hélico en décembre et en janvier.

Vue d'hélicoptère avec le glacier

Vue de la base depuis l'hélicoptère (certes les bâtiments sont tout petits vus d'ici)

 

 

    L'avantage d'une débâcle, c'est que nous voyons les manchots revenir de leur séjour dans l'eau. J'ai eu la chance de voir arriver un gros groupe de manchots empereurs avec le ventre bien plein qui sortaient de l'eau pour rejoindre la banquise puis leur colonie. Voici quelques photos:

Le saut de l'empereur

Les empereurs à la montagne (ça grimpe !)